À l’approche de l’entrée en vigueur du règlement SFDR 2.0, une étude de la fintech WeeFin dresse un bilan contrasté de la finance responsable. Si les engagements de façade se multiplient, la réalité des portefeuilles peine encore à refléter une véritable transition écologique et sociale.
Un marché ESG en pleine croissance… mais en quête de crédibilité
Depuis cinq ans, les fonds labellisés ESG (Environnement, Social, Gouvernance) ont connu un essor fulgurant, portés par une demande croissante des épargnants et des investisseurs institutionnels. En France, plus de 700 fonds dits « durables » sont commercialisés, représentant plusieurs centaines de milliards d’euros d’encours. La promesse : investir dans des entreprises « vertueuses », qui contribuent positivement à la société et à la planète.
Mais dans les faits, la définition du « durable » reste floue. Les réglementations européennes (notamment SFDR, Sustainable Finance Disclosure Regulation) tentent d’y remédier en classant les fonds selon leur niveau d’engagement environnemental : Article 6 (pas d’engagement particulier), Article 8 (prise en compte de critères ESG) et Article 9 (objectif d’investissement durable explicite).
Des exclusions très sélectives
Le Baromètre 2025 de WeeFin, qui analyse les pratiques de plusieurs dizaines de sociétés de gestion, révèle des progrès notables sur certains sujets… et de sérieuses lacunes sur d’autres. Ainsi, 70 % des fonds interrogés excluent désormais les nouveaux projets charbon, un signe que la pression des ONG et des régulateurs commence à produire ses effets.
Mais dans le même temps, 74 % des mêmes fonds continuent à investir dans les énergies fossiles traditionnelles (pétrole, gaz), sans se fixer de calendrier de sortie clair. Pire : seuls 11 % des fonds Article 9 respectent déjà les critères renforcés de la future version de la SFDR, qui imposera l’exclusion des producteurs d’électricité fortement carbonés. Autrement dit, même les fonds les plus « verts » ne sont pas encore en conformité avec la réglementation à venir.
Le reporting d’engagement, parent pauvre de la gestion ESG
Autre point de fragilité : la faiblesse du reporting d’engagement actionnarial. En théorie, la gestion ESG ne consiste pas seulement à filtrer les entreprises, mais aussi à dialoguer avec elles, à peser dans les assemblées générales, à voter contre certaines résolutions si nécessaire. Cet « engagement actionnarial » est souvent mis en avant par les sociétés de gestion comme la preuve de leur sérieux.
Mais selon WeeFin, seuls 35 % des fonds publient un rapport détaillé sur leurs actions de vote et d’engagement, ce qui rend très difficile toute évaluation externe. Le reste se contente de déclarations générales sans preuves tangibles. Sans transparence, difficile de croire à une transformation réelle des pratiques des entreprises financées.
La data, clé de voûte d’une finance durable crédible
Pour sortir de cette zone grise, la question de la qualité des données extra-financières devient centrale. Qui mesure quoi ? Selon quelles méthodologies ? Comment comparer deux fonds affichant tous deux un label « vert » mais investissant dans des entreprises très différentes ?
WeeFin propose une solution intégrée : une plateforme qui collecte, centralise et historise toutes les données ESG, mesure les indicateurs PAI (impacts négatifs principaux) et permet un suivi automatisé de la trajectoire carbone des portefeuilles. Objectif : armer les gérants pour qu’ils puissent répondre aux exigences de transparence du futur règlement SFDR 2.0, tout en offrant aux clients une vision plus claire de l’impact réel de leur épargne.
Vers une nouvelle norme d’ici 2026
Le message est clair : les temps de l’ESG marketing touchent à leur fin. Pour mériter leur étiquette « durable », les fonds devront démontrer une cohérence réelle entre discours et pratiques, tant dans leurs investissements que dans leur stratégie d’engagement. L’avenir de la finance responsable dépendra de cette rigueur, sous peine de voir la confiance des épargnants s’éroder.
Sources : Baromètre de la finance durable 2025, WeeFin (Actusite, 28 mai 2025).